« Assuré ? Ce n’est tout simplement pas possible », lance l’horticulteur d’un ton alarmant

Deux mois après l’épisode de tornade de verglas qui a détruit sa ferme maraîchère en Eure-et-Loir, Fabien Varet a fait le calcul, les dégâts s’élevaient à 160 000 euros.

Le 5 septembre 2022, la ferme de Fabien Varet à Louville-la-Chenard (Eure-et-Loir) a été détruite par un phénomène météorologique violent et très localisé. Deux mois plus tard, il est toujours en mode survie et n’a aucun espoir qu’un jour les choses changent en termes de rémunération.

Le hangar de 2 500 m2, qui était encore il y a deux mois une tanière bourdonnante, est désormais beaucoup plus calme. Les trois quarts de ses employés sont techniquement au chômage, les personnes présentes travaillant de longues heures pour survivre après ce qui leur est arrivé le 5 septembre 2022.

Une Cueillette bio engagée

Le jour de la catastrophe, vers 17h30, un rare épisode de temps violent frappe la ferme, mêlant grêle de la taille d’une balle de ping-pong et vents violents. Si puissant qu’il a renversé plusieurs tonnes de machines agricoles !

La grêle détruit les serres tunnels, les panneaux photovoltaïques, les fruits et légumes, les enseignes… personne ne résiste. Cela ne prend qu’une dizaine de minutes.

Son opérateur, Fabien Varet, estime aujourd’hui une perte d’environ 160 000 euros. Autrement dit, une grosse perte pour une entreprise qui ne dégage pas de grosses marges et dont les managers peinent à se payer. Au cœur de la vaste ferme céréalière de la Beauce, vingt acres de cette Cueillette bio est un grain de sable.

Un grain de sable par la taille et la nature de l’activité maraîchère, mais pas par l’engagement et la foi de ceux qui y travaillent.

En auto-suffisance énergétique

Fabien Varet, après être devenu artisan de la pierre, a repris l’exploitation agricole traditionnelle de son père dans les céréales. Il déménage du centre-ville à quelques kilomètres en plaine en 2010 avec l’ouverture de ce bâtiment qui est recouvert d’une toiture photovoltaïque de 1700 m2 qui offre une production électrique de 250 kW en pointe et lui garantit non seulement une autonomie énergétique mais positive énergie. énergie.

L’année suivante, il lance sa ferme de cueillette et, jusqu’en 2017, il est conventionnel avant de sortir du lot en vendant tout le rayon céréalier et en laissant juste assez de place pour engager une démarche de court-circuit. 100% selon ce qu’il aspire à être.

Être court-circuité, pour moi, ne veut pas dire systématiquement vendre près de chez soi mais sans que les intermédiaires ne gonflent les coûts. Par exemple, j’ai actuellement un partenariat pour échanger des pomelos de Rungis et des clémentines de Corse contre mes légumes d’Eure-et-Loir

Un combat permanent

Depuis qu’il a commencé à choisir cette nouvelle version, Fabien Varet n’a cessé d’améliorer la qualité de sa production et le bien-être de dizaines de ses salariés. « Nous nous battons tout le temps, c’est un combat permanent car le travail coûte cher en coût social surtout avec nos options diversifiées ».

Avec plus de quatre-vingts références de fruits et légumes, Cueillette Varet ne facilite certes pas la tâche mais entend répondre aux attentes des consommateurs.

Pour le maraîchage il n’y a même pas de techniciens à la chambre d’agriculture d’Eure-et-Loir et, lors d’une récente réunion avec le sous-préfet de Dreux, on a entendu dire que l’agriculture est en transition… Mais lui, toujours, en transition ! Il y avait plus de 10 000 exploitations dans les années 60, 3 000 aujourd’hui avec une surface moyenne en croissance constante…

Regrette également de ne jamais avoir vu « un maire franchir mon seuil de fonctionnement pour se rendre compte de ce que nous faisons, de ce pour quoi nous vivons ».

« S’assurer ? Tout simplement impossible ! »

Une fois le choc dévastateur du 5 septembre passé, tout le monde a retroussé ses manches, s’encourageant, espérant des jours meilleurs, mais le fil était ténu.

Huit salariés sont actuellement en chômage technique « pour une durée de trois mois et j’espère prolonger le plus possible jusqu’à la prochaine saison. Nous y travaillons avec un petit stock d’hiver mais avec des dimensions qui ne sont pas aux normes requises ».

Ces huit salariés connaissent clairement des difficultés avec ce chômage, Fabien les invite un jour par semaine sur sa ferme pour participer à ces activités.

Pour faire face à des dommages de 160 000 euros, il n’y a pas d’assurance à l’avance. Pas par choix, comme le résume Fabien Varet :

C’est sûr que le ticket d’entrée se situe entre 30 000 et 50 000 euros par an… rien que pour la grêle ! Nous ne fournissons que du capital. Il est à noter que chaque assurance grêle s’ajuste au légume en question et donc une déclaration spéciale doit être faite !

Évidemment, avec quatre-vingts références c’est quatre-vingts déclarations, au mètre carré près sur 200 000 m2 de surface agricole à la ferme… complètement irréalisable. « Absolument fou, tout est fait pour qu’on n’ait pas d’assurance ».

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Fabien se souvient d’un de ses amis qui, désabusé, a vendu toute sa ferme détruite par une tempête de verglas « il conduit maintenant une déneigeuse sur la piste de ski ».

La grêle n’est pas catastrophe naturelle

Le maraîcher fait le parallèle avec une assurance auto dont aucun automobiliste ne peut se défaire s’il veut conduire « ça devrait être pareil, on ne peut pas fonctionner sans assurance intempéries et du coup on va créer un fonds de garantie pour les autos ».

Fabien Varet a à cet égard salué l’engagement de l’adjoint de Philippe Vigier à ses côtés « qui m’a dit que malheureusement j’ai été touché trop tôt car la ligne bouge, il semble qu’il se passe quelque chose au niveau national ».

Vers un nouveau cadre légal pour protéger les exploitants agricoles

La loi d’orientation n°2022-298 relative à une meilleure répartition de l’assurance récolte dans l’agriculture et à la réforme des outils de gestion du risque climatique dans l’agriculture, instaure à partir de janvier 2023 un nouveau dispositif de couverture des risques, qui se répartit en trois niveaux :

■ Les imprévus courants seront à la charge de l’agriculteur. Ces derniers peuvent également s’appuyer sur d’autres dispositifs existants (comme le plan de relance français) pour investir dans des équipements de protection qui augmentent la résilience de leurs opérations face aux aléas climatiques,

Quelques aides et un énorme élan de solidarité

■ Les imprévus importants seront couverts par une assurance subventionnée, pour les producteurs ayant choisi de s’assurer,

■ Danger extrême de déclenchement de l’intervention de l’État, y compris pour les agriculteurs non assurés.

Bien qu’une tempête de grêle ne soit pas considérée comme une catastrophe naturelle car elle peut être assurée, elle était tout de même accompagnée de vents si violents qu’elle a réussi à renverser une machine agricole de 16 tonnes ! « Je n’ai jamais vu ça de ma vie. »

Ainsi, depuis septembre, Fabien Varet peut compter sur l’aide de la Direction Régionale In-extremis du Département car l’enveloppe s’est clôturée fin septembre et en ce moment il espère que la MSA contribuera aux cotisations sociales agricoles.

La catastrophe n’aurait pas pu se produire au pire moment depuis septembre en raison des récoltes de légumes d’été et des attaques sur les fruits et légumes d’automne comme les courges et les cucurbitacées.

Avec le soutien de solides clients locaux et parisiens, collègues et amis, de structures comme Locavor, un chat est apparu sur la plateforme de financement participatif Miimosa fondée par Hive qui dit précisément oui.

L’optimisme pas encore de rigueur

A ce jour, un don de 50 000 euros a été enregistré « avec des gens qui donnent ce qu’ils peuvent mais de tout leur cœur, c’est très touchant. Nous avons aussi un don anonyme du Languedoc de… 10 000 euros ! »

Aide reçue mais la tâche reste colossale.

Fabien et ses collaborateurs passent des heures, jour et nuit, à recouvrir les tunnels forés, rapiécer, récolter ce qui reste et faire la soupe, préparer, ressemer la future production…

Naturellement optimiste et engagé, Fabien ne cache pas que l’avenir est encore très sombre avec des coûts de transport qui s’envolent, des camions en panne.

5700 euros de PAC

Il avait annulé sa tournée lundi et trouvé le soutien des amis Bobinage d’eurélien qui lui ont prêté un camion, de Pa’dou qui a fait don de citrouilles ou d’un verger local qui a offert des légumes et des fruits.

C’est un travail très dur physiquement, il y a une vraie pénibilité, je me tourne vers les pilules pour le dos et comme on ne touche jamais d’argent, la retraite est calculée sur les cotisations MSA. Mon père est venu royalement à 800 euros ! Oui j’ai le capital, ce terrain, ce hangar, mais si je vends à mes enfants, je ne vais pas faire monter le prix.

Fabien Varet est le porte-parole de toute la filière des circuits courts, dont on ne cesse de vanter les bienfaits, à savoir la souffrance.

« Un homme lui-même, un bon robot aujourd’hui, avec 250 ha de terre peut parfaitement exploiter et toucher 90 000 euros PAC annuellement, on plante du miscanthus et on n’y touche plus… pour nous, 5 700 euros pour nos 20 ha alors que nous vivent douze familles, l’hiver j’arrache la ciboulette », raconte le maraîcher.

Fabien a été pompier pendant vingt-huit ans. Il sait très bien ce que peuvent cacher certains drames du monde agricole, « beaucoup d’accidents sont des suicides déguisés pour que des familles puissent être aidées, indemnisées ».