Changement climatique L’alimentation aussi menacée par les catastrophes climatiques

ven. 28 octobre 2022 à 10h05 • AFP

Les crises liées à la guerre, aux catastrophes climatiques ou aux pandémies ont ébranlé les systèmes alimentaires mondiaux et poussé des millions de personnes dans la faim et la pauvreté.

Le sujet sera sur la table de la prochaine conférence de l’ONU sur le climat, la COP27, début novembre à Charm el-Cheikh, en Égypte. Les inondations, les sécheresses et les vagues de chaleur affectent les cultures de l’Europe à l’Asie, menaçant la famine dans la Corne de l’Afrique. Et les experts préviennent que cela pourrait n’être que le début.

« Si nous n’agissons pas maintenant, ce n’est qu’un échantillon de ce qui pourrait arriver », prévient Mamadou Goita, un expert du groupe IPES-Food, qui travaille avec des organisations agricoles en Afrique et dans le monde.

La production alimentaire est à la fois une source majeure d’émissions, contribuant au réchauffement climatique, et est également très exposée aux effets du changement climatique : à long terme (baisse des rendements, réchauffement des océans, variations saisonnières ou chaleur excessive pour les travailleurs agricoles), mais aussi à court terme.

Les inondations peuvent causer « une dévastation soudaine des moyens de subsistance et des infrastructures », a déclaré Rachel Bezner Kerr, professeur à l’Université Cornell et auteur principal du rapport du GIEC (experts des Nations Unies sur le climat) sur les impacts climatiques.

Crise du kimchi

L’année 2022 en offre des illustrations dramatiques

Les vagues de chaleur ont affecté les cultures dans toute l’Asie du Sud, la sécheresse a dévasté les cultures en Europe, la chaleur a dévasté les cultures de choux en Corée du Sud, provoquant une «crise du kimchi». Les inondations ont submergé les rizières au Nigeria et en Chine, la sécheresse a frappé le bassin du fleuve Yangtze, qui abrite un tiers des cultures du pays. Les autorités ont envoyé des drones pour « ensemencer » les nuages ​​dans le but d’attirer la pluie.

Les plus vulnérables sont les plus touchés. Environ 22 millions de personnes risquent de mourir de faim au Kenya, en Somalie et en Éthiopie, selon le Programme alimentaire mondial de l’ONU, après quatre saisons des pluies… pas de pluie.

« C’est comme si notre relation se déroulait en temps réel », commente Mme Bezner Kerr.

Au Pakistan, des inondations dramatiques liées à une mousson extraordinaire ont englouti de vastes étendues de terres agricoles, dévastant des cultures de base telles que le riz, les tomates et les oignons.

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Dans le district de Mirpur Khas, dans la province agricole du Sind, l’eau a submergé la récolte de coton d’Akbar Rajar. « Nous sommes constamment en danger », se plaint le paysan très indiscipliné, qui s’apprête à semer du maïs dans un sol détrempé.

Selon la Banque mondiale, jusqu’à neuf millions de personnes pourraient être plongées dans la pauvreté par la catastrophe.

« Frénésie » spéculative

Les crises peuvent entraîner des restrictions à l’exportation, comme celles imposées cette année par l’Inde lorsque sa récolte de blé a souffert d’une vague de chaleur. La spéculation et la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine n’ont pas aidé, faisant par exemple grimper le prix des engrais.

L’une des solutions est l’argent, en particulier pour les petits agriculteurs en « première ligne » du changement climatique et de l’insécurité alimentaire, selon Claire McConnell du groupe de réflexion E3G. Seuls 2% des financements climatiques leur parviennent, selon l’expert.

Un autre enjeu majeur est la réduction des émissions. Car la production alimentaire deviendra « impossible » dans certaines régions si le réchauffement continue sur sa trajectoire actuelle, selon le GIEC.

Rediriger des milliards de dollars de subventions agricoles qui nuisent à l’environnement et au climat serait un véritable levier, selon Mme Bezner Kerr.

Les habitants des pays riches pourraient réduire leur consommation de viande et donc l’utilisation de céréales pour nourrir les animaux, ce qui contribue souvent à la déforestation. Et les nations du monde entier pourraient varier leur alimentation au-delà du riz, du blé, du maïs ou des pommes de terre habituels.

Cela pourrait avoir du sens en Égypte, hôte de la COP27, où la plupart du blé importé est subventionné par l’État. Cela permet de garder le pain bon marché.

Mais ces solutions ont leurs limites.

« Comment produit-on une souche qui, même après avoir été sous l’eau pendant quelques jours, reste dure ? », demande Nabeel Munir, le diplomate pakistanais qui préside le principal bloc de négociation des pays en développement dans les négociations sur le climat.

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