« Compromis : la situation financière de fond », Aurore Gadrat Experte en droit immobilier – SVP

L’établissement d’une condition suspensive de financement dans l’avant-contrat nécessite un contrôle par le courtier.

En tant que précontractants et intermédiaires de vente, les courtiers ont l’obligation d’assurer la viabilité des engagements des parties. Une attention particulière doit être portée aux clauses de financement de la reprise.

La protection de l’acheteur qui recourt à un prêt

La loi dite Scrivener II de 1979 a introduit dans la réglementation des dispositions protégeant l’acquéreur et, notamment, imposant que l’achat d’un bien immobilier par un acheteur au détail soit nécessairement soumis à la condition suspensive de l’obtention d’un prêt, sauf dérogation expresse. Si l’acheteur n’obtient pas son financement, la vente est annulée : le compromis est caduc.

Les personnes couvertes par cette protection sont les acquéreurs non professionnels, personnes physiques ou morales, qui acquièrent un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel.

Lorsque le bien n’est pas bâti, il entre dans le régime de protection dès son acquisition en vue de la construction d’un immeuble d’habitation ou à usage mixte.

La loi s’applique également à l’achat d’actions ou de parts sociales en vue de l’usage résidentiel d’un bien.

Sont ainsi exclus du dispositif, les professionnels (personnes physiques ou morales) qui agissent dans le cadre de leur profession.

Une partie importante de la protection concerne les informations qui sont données à l’acheteur qui ne veut pas faire usage d’un prêt. Dans ce cas, le compromis doit comporter une clause indiquant que le prix sera payé sans recours au crédit. L’acheteur devra alors renoncer expressément à se prévaloir d’une condition suspensive en adressant une note manuscrite. Attention : en cas d’acheteurs multiples, chacun doit remplir cette note manuscrite.

La conséquence de l’absence ou de l’irrégularité de cette mention est que l’acquéreur qui souhaite finalement contracter un prêt bénéficiera de la condition suspensive du prêt, conditionnant ainsi son achat à l’obtention d’un prêt.

La jurisprudence a précisé l’idée d’obtenir un prêt. Il s’agit d’une offre ferme et inconditionnelle d’un établissement de crédit, qui répond aux conditions énoncées dans le compromis de vente. Un simple accord de principe ne permet donc pas de considérer la condition suspensive comme remplie.

Bon à savoir : Il a été considéré que l’offre obtenue sous condition d’acceptation de l’assurance emprunteur valait une offre de crédit ferme et permettait de considérer la condition suspensive du compromis comme pleinement réalisée.

Pour rappel, la durée de la condition suspensive doit être d’au moins un mois à compter de la date de signature de l’avant-contrat (ou de son enregistrement s’il est imposé). Les parties peuvent convenir de prolonger ce délai, mais avant la date limite d’obtention du prêt. En effet, passé ce délai, sans que le prêt soit obtenu, le compromis est nul et non avenu.

Les points de vigilance pour l’agent immobilier

Les parties peuvent convenir de préciser les obligations de l’acheteur.

En pratique, il est d’usage, par exemple, de préciser les conditions financières du prêt que l’acheteur devra solliciter auprès des établissements de crédit. La condition suspensive précisera que le prêt demandé sera à un taux d’intérêt déterminé, ou pour une durée déterminée, voire pour un montant de mensualités déterminées.

Souvent, l’avant-contrat stipule que l’acquéreur doit accomplir la procédure de demande de prêt ou tenir le vendeur informé des démarches dans un certain délai (qui ne peut être inférieur à 1 mois).

Le compromis de vente déterminera également utilement le nombre d’organismes bancaires que l’acquéreur devra approcher. S’il est précisé que l’acquéreur s’engage à introduire des demandes de prêt auprès d’un organisme bancaire, il peut se contenter d’en solliciter un seul.

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Si en revanche, il est précisé qu’il doit en demander au moins 3, il sera obligé d’entreprendre des démarches auprès du 3.

Attention : le courtier doit s’assurer que les formalités sont respectées, notamment en ce qui concerne la mise en demeure de l’acheteur afin de justifier d’obtenir ou non le prêt après l’expiration du terme. A défaut, il pourra voir sa responsabilité engagée pour manque de soin dans le suivi de ses dossiers.

Notez que certaines clauses ne sont pas légales. C’est le cas d’une clause qui obligerait l’acquéreur à notifier au vendeur dans le délai légal d’un mois si le prêt a été réalisé ou non, faute de quoi les sommes versées seraient perdues. En effet, le délai légal est destiné à obtenir le prêt et non à informer le vendeur, qui peut donc valablement intervenir après son terme.

Il en est de même d’une clause stipulant que ne pas informer le vendeur équivaut à obtenir un prêt.

La solvabilité de l’acheteur est un point d’attention important pour le courtier. Il doit s’assurer que l’acquéreur dispose de l’argent au jour de la signature du compromis s’il souhaite acheter sans contracter d’emprunt. Pour le reste, les juges sont d’avis qu’il assume sa responsabilité vis-à-vis du vendeur.

Si le courtier n’est pas en mesure de financer au comptant, il devra aviser en incluant une condition suspensive au prêt ou une condition de vente de sa propriété s’il y a lieu.

En cas de financement de l’acquisition par le prix de vente de l’immeuble de l’acheteur, le courtier doit inclure dans le compromis une condition suspensive à la conclusion de cette vente, à défaut de quoi il pourrait voir sa responsabilité engagée en cas de non-paiement.

Comme cette situation devient de plus en plus courante, il est nécessaire de s’assurer que l’acheteur a toutes les chances de réaliser sa propre vente.

La défaillance de la condition suspensive : la caducité de la vente

La Cour de cassation a confirmé une condition suspensive à la réalisation de la vente du bien immobilier de l’acquéreur avant la conclusion d’un contrat de vente (dans le cas où un mandat de vente a été conclu). Toutefois, il convient de s’assurer de l’existence d’un engagement réel de la part de l’acquéreur et de joindre au compromis l’avant-contrat de vente de son bien immobilier dont les conditions suspensives seraient levées, à côté de la condition suspensive.

Le non-respect de la condition suspensive survient lorsque l’acquéreur ne reçoit pas son prêt dans les délais. Dans ce cas, le compromis est nul et non avenu. Les parties peuvent également convenir de prolonger le terme en cas de changement, laissant ainsi plus de temps à l’acheteur pour obtenir un financement.

Si aucun financement n’est obtenu, la saisie payée par l’acheteur doit en principe lui être restituée sans délai. Cependant, le séquestre des fonds, souvent le courtier, ne peut restituer les sommes qu’avec l’accord des parties ou une décision du juge. Ainsi, en cas de litige, le courtier ne peut restituer les fonds détenus à l’une ou l’autre des parties tant qu’un juge n’a pas tranché le litige.

Attention, si l’acheteur n’a pas respecté les termes du contrat, par exemple en dépassant le terme sans pouvoir justifier d’un accord de prêt, il faudra prouver sa faute afin d’obtenir l’indemnité prévue à la clause pénale.

– Arrêt de la Cour de cassation du 23.06.2010 n°09-15.963