La semaine prochaine aura lieu le traditionnel week-end de la truffe à Uzès, au cours duquel un particulier pourra acheter, entre autres, des truffes noires fraîches sur le marché de la place aux Herbes. A cette occasion, nous avons rencontré Michel Tournayre, qui, avec quatre autres amis, a initié cette rencontre devenue incontournable pour les passionnés de diamant noir, qui a œuvré avec talent pendant quatre décennies pour donner à la truffe toutes ses nobles étoiles.
Pour les Tournayres, la truffe est une affaire de famille. « Quand j’avais dix ans, j’allais déjà avec mon grand-père chercher des truffes dans le maquis d’Uzetian », raconte Michel Tournayre. Un demi-siècle plus tard, celui que tout le monde appelait Lou Pierret n’est plus, mais son portrait est toujours accroché à l’entrée du magasin, comme s’il continuait à veiller avec bienveillance sur sa tribu.
Une récolte en baisse
Rien que cette année, avec « 110 jours sans une goutte de pluie », la tribu doit faire face à une baisse drastique de la production familiale. Résultat : les clients ne se précipitent pas dans la petite cabine au doux parfum de truffe. « Nous avons eu 50 % de récolte en moins par rapport à l’an dernier », confirme le trufficulteur qui surveille chaque matin ses 23 hectares de truffière, où chaque plantation a son propre nom et où près d’une quinzaine d’espèces d’arbres se côtoient. exigence. fournir du carbone au champignon. Pour l’instant, « le manque de truffes a pour effet de faire grimper le prix du kilo », qui a atteint cette année 1 300 euros pour certains trufficulteurs du Gard.
Le picon en main
Malgré la période de soudure, Michel et ses filles Lucie et Margot s’écrasent régulièrement, comme en cet après-midi de décembre, quand le ciel lancinant quelques nuages et le vent semble perdu dans la vallée. Bottes aux pieds, sacs en bandoulière, pioches à la main (*), l’équipe est prête. Margot ouvre la voie avec son chien Foxy. « C’est impossible de trouver des truffes sans chien », confirme la jeune femme.
Il faut à peine quelques minutes avant qu’un jeune labrador, jeté dans une truffière au début des années 1960 par le père de Michel, René, alors considéré comme « fou » par la plupart des paysans locaux à l’époque, s’arrête au pied de l’un d’eux. une petite feuille de tilleul et commence à gratter le sol. Lucie, postée à côté de lui, le félicite et plante délicatement son picone et sort la première truffe d’une trentaine de grammes. « Il y a des arbres qui ne produisent pas de truffes depuis des années, et d’autres qui peuvent produire plus d’un kilo par an », souligne le jeune trufficulteur.
Une philosophie de vie
Actuellement, la propriété ne compte que quatre hectares en production. Mais cela n’empêche pas toute la truffière de faire l’objet d’une attention particulière. « Nous gérons l’eau (avec la micro-aspersion) au plus juste grâce à des sondes omniprésentes pilotées par ordinateur positionnées pour analyser l’état hydrique du sol », explique Michel Tournayre, qui en profite, smartphone en main. voir les dernières données du jour fournies par cette station météo mobile.
Le piège de la confidentialité
Au milieu des années 1990, il décide de faire de la trufficulture sa principale activité agricole après qu’un autre champignon, la fusariose, ait détruit à plusieurs reprises toute sa plantation d’asperges. « C’était un signe », sourit Michel, qui deviendra tour à tour président de l’Association des trufficulteurs du Gard, président de la Fédération française des trufficulteurs et, pendant quelques mois encore, président de l’Union européenne de la truffe et de la trufficulture. Groupe. trouvé dans la culture de la truffe une certaine philosophie de vie, qui relève de l’humilité, de la patience et surtout du contact avec la nature.
Passage au laboratoire
« Michel Tournayre C’est très important dans la trufficulture de transmettre ce que l’on pense savoir. Et pour cela il faut être prêt à se remettre en question ! »
Le trufficulteur d’Uzet avoue avoir beaucoup appris en rencontrant d’autres passionnés de tuber melanosporum comme lui, qu’ils soient agriculteurs, scientifiques, techniciens ou responsables syndicaux. « Ils m’ont permis de mieux comprendre les secrets de la production et de devenir plus efficace. »
Margot forme dans la propriété familiale les chiens au cavage
Depuis plusieurs années, ce sont une vingtaine de trufficulteurs qui communiquent entre eux sur leurs données, leur bagage technique, mais aussi leurs expériences et bien sûr leurs échecs. « Seul dans ton coin, tu fais des bêtises ! Si tu ne développes pas de connaissances, tu peux mettre le produit en danger ! »
C’est de ces échanges qu’est né le besoin de transparence qui s’exprime aujourd’hui clairement sur le secteur et ses méthodes. « Vendre au comptant à l’arrière d’un camion est une fable souvent relayée par les médias, sourit Michel Tournayre. Chez nous, on achète des truffes avec une carte de crédit. Il faut savoir évoluer avec son temps ! »
Apprentissage
Si passer est important, apprendre l’est tout autant pour le patron des Truffières d’Uzès. « Formation – et donc professionnalisme ! – est essentiel car avec la connaissance, vous pouvez mieux contrôler la gestion des cultures. C’est juste qu’il n’y a aujourd’hui presque plus en France de lycées qui forment des trufficulteurs. « Le monde agricole n’a jamais vraiment compris la trufficulture. Et pourtant, la trufficulture professionnelle serait plus organisée et plus transparente. »