En Grèce, accrochée à la tradition, l’agriculture intelligente fait son chemin à tâtons

11/07/2022 05:17

| AFP

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Sur son téléphone portable, le Grec Sotiris Mournos étudie les variations du microclimat transmises par les stations météorologiques et les capteurs d’humidité installés dans ses champs de la plaine agricole d’Imathia, au nord de la Grèce.

Depuis deux ans, ce jeune agriculteur utilise des applications de gestion agricole pour accélérer sa production de coton et de fruits.

Désertification

Mais en Grèce, fidèle à ses traditions, l’agriculture intelligente, qui vise à produire plus et mieux de manière durable grâce aux innovations technologiques et numériques, progresse lentement.

Nichée derrière des hectares de pommiers et de pêchers, la station météo enregistre les données en temps réel. Cela permet d’analyser et de corréler l’impact des conditions climatiques sur une plantation de coton de dix hectares qui s’étend à perte de vue.

Grâce à ces nouveaux outils, « nous avons réussi à (…) augmenter les rendements financiers » de notre exploitation, se félicite cet homme de 25 ans, qui a abandonné ses études universitaires en informatique pour se consacrer à la terre familiale.

Mesurer la teneur en humidité ou en azote du sol permet, par exemple, d’éviter une surutilisation d’engrais ou de conserver l’eau.

Le développement d’une agriculture intelligente peut s’avérer être une réponse à la désertification rurale.

Pays traditionnellement agraire dans le passé, la Grèce a perdu de nombreux professionnels de ce secteur au cours des dernières décennies. L’agriculture, délaissée au profit des services et surtout du tourisme, ne représente plus que 5% du PIB.

« La majorité des jeunes de mon village préfèrent travailler dans d’autres champs et arrêter de travailler dans les champs », a déclaré Sotiris Mournos.

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Dans le village de Platy, ce fermier était encore une exception. Ses confrères agriculteurs restent très attachés à la culture traditionnelle de l’irrigation, de la fertilisation fréquente et des pulvérisations préventives.

Défis environnementaux

Principaux freins au développement de l’agriculture intelligente : la faible superficie agricole –moins de 10 hectares en moyenne –, la topographie variée due au relief montagneux du pays, mais aussi la réticence des agriculteurs plus âgés, peu d’informatique.

A Kiourka, à une trentaine de kilomètres au nord d’Athènes, le producteur bio Thodoris Arvanitis déplore et ses collègues « ne s’intéressent pas (à la nouvelle technologie) car ils ne sont pas assez éduqués et estiment avoir assez d’expérience », a-t-il jugé.

Couplé au « manque d’esprit de coopération, problème endémique », déplore Aikaterini Kasimati, ingénieur agronome à l’université d’agronomie d’Athènes. « Il y a aussi une crainte de récupération des données enregistrées, un sujet qui a fait polémique au niveau international », note-t-il.

Résultat : la Grèce est en retard sur l’utilisation de ce système en Europe, indique Vassilis Protonotarios, responsable marketing de la société Neuropublic, spécialisée dans l’agriculture numérique.

Cependant, la pression sur les coûts de production et surtout les enjeux environnementaux liés au changement climatique ont poussé au développement de ces nouveaux modes de gestion agricole.

« Nous observons une dégradation continue des terres et une baisse des rendements », explique Machi Syméonidou, agronome et créateur de la startup Agroapps. « L’eau (aussi) est devenue très chère ».

Il se veut toutefois optimiste : « Nous ne sommes pas aux États-Unis ni aux Pays-Bas (où ces systèmes sont répandus, notent les éditeurs), mais à mesure que la technologie devient plus simple et moins chère, ces outils sont de plus en plus utilisés.