Vincent Pavanello, président de La Maison des Mandadaires, revient sur le succès du modèle d’agent, que tout le monde attend toujours…
Depuis que je m’intéresse aux réseaux d’agents, c’est-à-dire depuis au moins deux ans, j’ai rencontré des observateurs qui m’expliquent que leur développement récent n’est dû qu’à la très bonne santé du secteur. Autrement dit, le nombre de ventes a atteint de tels sommets que tout le monde a pu en profiter, et c’est au moment de la prochaine crise immobilière que l’on verra que, selon eux, c’était juste la mode.
La crise n’est pas là, ce que peuvent dire les pessimistes de tous bords, mais chacun y voit un atterrissage en douceur du marché immobilier en termes de volume de transactions. Problème pour les observateurs, presque tous les réseaux d’agents que je suis, grands, moyens et petits, sont en croissance au premier trimestre 2022, alors que le marché avait reculé d’environ 10% selon plusieurs sources.
Contrairement à ce qui était attendu, le ralentissement ne semble pas pénaliser les agents, bien au contraire. 5 éléments ci-dessous pour tenter d’expliquer ce phénomène inattendu par certains mais finalement très prévisible pour ceux qui, comme moi, ont compris la pertinence du modèle.
Pas de couts fixes pour les mandataires
Tous les chefs d’entreprise vous le diront, les coûts fixes sont une source constante d’inquiétude en période de ralentissement même léger de l’activité. Ils peuvent très rapidement transformer un profit en perte et vous ne pouvez pas toujours réduire autant que vous le souhaitez. Prenons l’exemple d’un boulanger obligé de payer son loyer mensuel ainsi que les salaires de ses employés. En cas de baisse de consommation de pain, vous ne pourrez pas réduire ce poste de dépense du jour au lendemain et accuserez donc une certaine perte.
On retrouve ce risque pour les professionnels de l’immobilier qui ont monté leurs agences, sachant que nombre d’entre eux ont fait ce choix ces dernières années. Au contraire, l’une des forces du modèle d’agent est l’absence de coûts fixes pour les professionnels pratiques. Hormis le prix du forfait mensuel, quelques dizaines d’euros tout au plus, les conseillers rattachés aux réseaux n’ont quasiment pas de dépenses limitées et seront donc plus agiles pour s’adapter à la nouvelle donne du marché.
La possibilité de développer des revenus annexes
Quand on voit la pérennité d’une entreprise, il faut avoir un œil sur les coûts (on en parlait juste avant) et l’autre sur les revenus. Et là encore, il semble que le modèle de réseau d’agents présente de nombreux avantages dans un marché un peu plus difficile.
Comme vous le savez, la plupart des réseaux permettent à leurs consultants de recruter puis de former d’autres agents. Les modèles de parrainage sont différents d’un réseau à l’autre mais le principe est toujours le même : un consultant qui recrute des talents et consacre du temps à leur formation, voit ses revenus augmenter à chaque fois que son filleul réalise une vente. C’est la même logique qui prévaut lorsque le gérant d’un magasin de sport reçoit une prime parce que ses vendeurs ont fait un excellent travail.
Les agents immobiliers qui ont réalisé ce travail d’animation de recrutement ces dernières années vont donc bénéficier d’une source de revenus supplémentaire en plus des ventes qu’ils réalisent eux-mêmes. C’est un avantage considérable par rapport aux conseillers des agences traditionnelles.
Des têtes de réseaux qui vont continuer à investir
En période d’accalmie, certaines entreprises préfèrent également réduire leurs investissements. Parmi les budgets généralement victimes de coupes sévères, on retrouve les dépenses de marketing ou de communication. Je n’ai aucune raison de penser que c’est ce que nous allons observer dans les réseaux d’agents.
Au contraire, la plupart des grands réseaux affichent une solidité financière qui leur permettra de continuer à investir quels que soient les chocs de marché. Les récentes levées de fonds d’iad, Safti, properties-privées.com, BSK, Keller Williams ou encore Sextant, et la bonne santé financière de l’ensemble des réseaux, montrent que les réseaux ont les moyens d’investir encore et encore dans la notoriété de ses marques et au service de ses agents.
J’ai aussi ajouté, toujours sans trahir aucun secret, que les ambitions de ces réseaux, qui ne représentent encore que 22% de part de marché, sont si grandes que l’enjeu est moins de réagir à une adaptation opportune du marché que de se préparer aujourd’hui. la croissance des 5 ou 10 prochaines années. Loin d’être une mode, ces réseaux sont là pour rester.
La culture de l’intercabinet
L’union fait la force, slogan encore plus fort en période de baisse du marché ! Après deux ans d’euphorie, tous les conseillers constatent que la marchandise tarde un peu à sortir. Les acheteurs réfléchissent davantage et sont plus disposés à négocier les prix que par le passé. Il serait excessif de dire que le rapport de force s’est inversé, mais disons qu’il s’est en partie rééquilibré.
Dans ce contexte, l’intercabinet est une réponse très appropriée. Ce système consiste à réaliser des transactions en s’appuyant sur l’expertise de deux conseillers immobiliers distincts : l’un qui saisit le mandat de vente et l’autre qui trouve l’acquéreur. Dans ce domaine encore, je pense que les agents ont une vraie carte à jouer sachant qu’ils réalisent déjà entre 10% et 20% de leurs ventes avec cette solution.
La plupart des réseaux ont en effet développé des outils informatiques facilitant le partage des mandats entre conseillers. A ces outils numériques s’ajoutent, pour les plus grands acteurs, un effet taille important. Contrairement à une agence indépendante qui compte souvent moins de 5 conseillers, certains réseaux comptent plus de 1000 agents, c’est le nombre de personnes susceptibles de trouver acquéreur pour un certain bien qui aurait été saisi par l’un des conseillers du réseau.
Un esprit d’entrepreneur
Il ne faut pas exagérer, et je sais qu’on trouve aussi des entrepreneurs très talentueux parmi nos confrères des agences physiques. Disons que la culture entrepreneuriale qui transparaît dans les réseaux d’agents peut être un atout.
Incarnés par des leaders et transmis par des managers de terrain, les agents immobiliers baignent dans cette culture et se considèrent tous, à juste titre, comme des chefs d’entreprise. Beaucoup d’entre eux ont déjà eu des difficultés à leurs débuts et sont donc peut-être plus résilients que la moyenne.
Ils seront nombreux, au sein de ces réseaux, à considérer l’atterrissage du marché comme une formidable période d’opportunité. 22% de part de marché laisse la place à un entrepreneur ambitieux !
Par Vincent Pavanello, fondateur de la Chambre des procureurs