Les grands travaux du centre-ville sont rarement faciles. Pour une commune qui subit des plaintes et autres remarques. Pour les riverains confrontés à des nuisances. Pour les commerçants qui voient leur chiffre d’affaires se réduire. A Hyères, le site du « Triangle d’Or » ne déroge pas à la règle. C’est l’avenue de Gaulle et le bas de l’avenue Gambetta qui lancent les hostilités.
Si les commerçants de la zone piétonne tirent la langue (notre édition du 19/11), dans le bas de l’avenue Gambetta, c’est la soupe aux grimaces. Et la destruction imminente des trottoirs pour leur réhabilitation pourrait être, pour certains, le coup de grâce. C’est le cas de la boulangerie Pastor (Maison Margot), qui fait partie du paysage de Hyères et dont l’avenir est en suspens. « C’est vraiment mauvais, on a pris beaucoup d’argent », a laissé Thierry Clairand. « Nous comprenons que des travaux sont nécessaires. Mais l’organisation n’est pas assez précise pour une population d’aînés qui sont la clientèle du Pasteur. Ce sont souvent des gens qui marchent difficilement, ils sont perdus avec toutes ces barrières. » Quant aux automobilistes qui se sont arrêtés pour acheter une baguette, c’est fini. Outre le sens unique mis en place, « la circulation est très compliquée. Les gens ne veulent plus traverser la ville et n’empruntent plus l’avenue Gambetta ».
Ce lundi, les époux Clairand étaient devant le tribunal de commerce pour se déclarer en faillite. « On est à -40 % ou -60 % de factures. Et tout augmente, les matières premières, l’électricité. On ne tiendra pas jusqu’au versement des indemnités, fin 2023. Il faut être à jour avec l’Urssaf. L’institution est en danger. On a la tête sous l’eau, 17 salariés et si on coule, la boulangerie des Salins mourra aussi », insiste Thierry.
Des indemnités plus rapides?
Sa solution ? Cette indemnisation, au moins en partie, doit être versée en priorité pour « limiter les dégâts et maintenir les commerces ouverts ». Et de conclure avec amertume : « La compensation, ils ne donneront pas grand-chose… »
Les réfections de trottoir à venir ne sont pas faites pour le rassurer. « Ce sera encore pire. Si les clients ne peuvent plus venir facilement à pied, il n’y aura plus personne… » Un constat partagé par d’autres commerçants de Gambetta. A la boutique du Casino, nous sommes également concernés. « Si je ne peux pas sortir les fruits et légumes, les clients vont penser qu’on est fermés. Avec une perte de -30%, on ne va pas durer, on va fermer, on ne prendra pas le risque de s’endetter. »
Même vision pour La Chausserie : « Samedi, on a fait 9 euros de ventes, c’est la première fois depuis 50 ans. Déjà les clients ne peuvent plus se garer, ce sera encore pire quand les trottoirs seront défoncés.
Chez primeur Mireille, l’avenir est aussi sombre. « Tous les clients qui sont venus en voiture, je ne les vois plus. Sans les trottoirs, je perdrai 60% du chiffre d’affaires, ce ne sera pas possible. Qui paye le loyer ? L’indemnité doit aller à la vitesse du S’il arrive dans un an, il sera trop tard… Les charges sont payées pour l’instant. Et une fois que les clients ont pris l’habitude d’aller ailleurs, il est impossible de les trouver… »
« On fait le maximum »
Consciente de la situation, la municipalité insiste « pour écouter, faire le maximum et recevoir les insatisfaits ». Mais l’équation n’est pas facile à résoudre et la solution d’une indemnisation anticipée est techniquement et juridiquement impossible.
« La commission d’indemnisation que nous avons mise en place n’est pas obligatoire, précise Véronique Bernardini, assistante commerciale. Lors d’une réunion, nous avons clairement expliqué que c’est un juge qui dirige la commission, reçoit tous les dossiers, demande un solde sur trois ans. », en regardant le chiffre d’affaires passé. On ne peut pas compenser sans avoir cette visibilité. A cela, il faut ajouter le délai d’enquête de six mois, termes incompressibles. La loi, on ne peut pas faire autrement. »
Rassurance : « Les trottoirs seront entretenus devant les commerces sauf quand on s’occupera des réseaux. »
Autre mesure prise, la suppression du paiement de l’autorisation d’occupation temporaire du domaine public. « La reprise des réseaux a perturbé les délais », reconnaît Véronique Bernardini. « Mais les commerçants ont vu qu’il y avait un grand besoin de prendre le relais. Ces travaux ont été annoncés il y a deux ans, tout le monde savait que nous avions une phase un peu complexe. On fait de notre mieux, il faut rester solidaires. » conclut-elle.