Après des décennies de service fiable, les radiateurs en fonte disparaissent lentement des maisons québécoises, remplacés par des systèmes modernes et moins coûteux. Mais il y a plus, et certaines entreprises sont encore plus sophistiquées dans leur redressement. Des radiateurs les plus rudimentaires aux plus sophistiqués, ils ont tous en commun leur chaleur douce et leur silhouette traditionnelle.
Sur le site de l’ancien Hôpital de Montréal pour enfants, il y a plusieurs immeubles de 30 étages avec des tours à condos. Mais du côté du boulevard René-Lévesque, le foyer de soins est resté. L’édifice de trois étages a été entièrement restauré par son propriétaire, High-Rise Montreal (HRM), pour y aménager des bureaux.
Une fois l’amiante désamianté et les murs de briques intérieurs nettoyés, le propriétaire a voulu donner un aspect ancien au décor. En 2019, il avait restauré les barres de fer installées et les avait converties en électricité. « C’était plus cher que d’aller chez Home Depot et d’acheter un radiateur électrique, mais il a fière allure et convient à tout type de système de chauffage », a déclaré Christopher Rassi, chef de projet chez HRM. Pour ce projet, la MRH a fait appel à Ecorad, une entreprise de Saint-Jean-Port-Joli fondée par Pierre Lemieux, qui a fourni plus de 80 radios.
Des oeuvres d’art
Depuis plus de 40 ans, Pierre Lemieux répare des radiateurs en fonte. Il dit avoir compris, quand il était jeune, qu’avant d’être des appareils de chauffage, les radiateurs étaient des « sculptures ». À l’âge de 15 ans, il a commencé à préparer un vieux radiateur qui a été restauré à Montréal avec des matériaux provenant d’un réservoir d’eau chaude.
Ce qui était d’abord un passe-temps pour lui est devenu un travail. Il a donc eu l’idée de convertir les radiateurs à l’électricité. Chaque radiateur contient un mélange d’eau et de glycol – dérivé d’antigel récupéré de l’industrie automobile – qui augmente le contenu calorifique. Par conséquent, l’appareil n’est pas connecté à l’eau chaude et au four et peut fonctionner de manière autonome, comme une bouilloire électrique.
En 2007, Pierre Lemieux a fondé son entreprise, Ecorad, qui fait maintenant affaire partout au Canada et aux États-Unis, pour les clients qui désirent restaurer des appareils existants ou installer des radiateurs électriques. « Le premier que j’ai fait, en 1978, est toujours utilisé. Les gens me demandent combien de temps ils vont durer, mais je ne sais pas », a-t-il dit tranquillement.
Selon lui, la restauration des radiateurs est bénéfique d’un point de vue écologique. « L’énergie nécessaire pour démonter le radiateur produit 40% de son poids en gaz à effet de serre. Le radiateur est lourd, précise-t-il. Mais ce n’est pas tout. La restauration permet d’enlever et d’enlever en toute sécurité la peinture au plomb qui les recouvre. »
De plus, la chaleur rayonnante est plus stable que celle produite par convection, souligne-t-il. « Aujourd’hui, tout le monde parle de tuyaux de chauffage. Il est vrai que la pompe à chaleur consomme moins d’énergie que mon radiateur. Mais la durée de vie d’une pompe à chaleur est de 10 à 12 ans. Ainsi, l’énergie nécessaire à la fabrication de ce tuyau de chauffage sera épuisée une fois qu’il sera remplacé », dit-il. « Ensuite, le gaz utilisé dans les tuyaux de chauffage est le plus grand destructeur de la couche d’ozone. Tout le monde parle de la capacité de nos poches, mais pas de la terre. »
Pierre Lemieux est désolé de voir les vieux radiateurs jetés. « Ça me fait mal, surtout quand c’est une belle pièce. Les gens ne savent pas que c’est l’œuvre d’un artiste. C’est comme une sculpture en bois qui se répète plusieurs fois, mais c’est quand même un artiste qui l’a faite. »
Selon lui, il existe encore beaucoup de radiateurs de ce type en Amérique du Nord. « Les enquêtes les plus récentes que nous avons faites, qui ont commencé il y a six ou sept ans, montrent qu’au Canada, 800 000 maisons ont encore des radiateurs [en fonte]. Du côté américain, on parle de 11 millions de foyers », a déclaré Lemieux.
Ecorad n’est pas la seule entreprise à offrir une seconde vie aux radiateurs. Shafter Bros., par exemple, propose des services pour restaurer ou remplacer des radiateurs en fonte.
Églises et monastères
Produites dans plusieurs villes nord-américaines où se trouvaient des usines, les chaufferettes en fer furent installées en grand nombre, non seulement dans les maisons, mais aussi dans les monastères, les écoles et les églises. Cependant, le coût élevé des combustibles fossiles a conduit plusieurs organismes à opter pour des systèmes de chauffage alternatifs, comme la géothermie.
Or, Ecorad a converti à l’électricité les toitures de 30 autres églises du Québec, dont celles de Sainte-Anne-de-la-Pérade et de Saint-Eustache. L’entreprise a également réalisé plusieurs projets dans des écoles, dont l’école Maisonneuve à Montréal, et dans des édifices publics, dont le chalet du Mont-Royal.
Au Québec, un monastère augustinien a fait l’objet d’importants travaux de restauration entre 2013 et 2015, et le chauffage est désormais assuré par un système de géothermie. Afin de conserver les vestiges d’un appareil qui a fonctionné pendant 100 ans, nous avons cependant conservé quelques radiateurs métalliques, qui sont désormais alimentés à l’électricité.
La préservation des radiateurs figurera déjà dans l’appel à projets que la Ville de Montréal veut lancer en 2023 pour la vente et la reconversion de l’ancien Centre Saint-Paul, dans le sud-ouest. La ville pose comme condition au futur acquéreur que des éléments tels que les escaliers et les radiateurs soient conservés.