Walter HURE (110 Bourgogne) : « Anticiper les besoins est la meilleure arme…

D’une assemblée à l’autre, il y a forcément un changement, dans le visage des interlocuteurs qui doivent animer ou dans le mode de fonctionnement choisi pour marquer de telles rencontres. Surtout quand l’intervalle de temps entre les deux événements s’étend sur près de trois ans ! La COVID a donc fait son travail et privé les membres de la coopérative régionale de rencontres, ô combien importantes, en cette période de temps. C’était l’objectif affiché du président Walter HURE de renouer le fil devant un public attentif, établissant dans sa présentation la synthèse la plus cohérente…

AUXERRE : Nous sommes repartis du dernier grand rallye de la coopérative 110 Bourgogne avec une image forte en 2019. Avec, uniquement sur la scène du parc des expositions d’Auxerre, la silhouette corpulente et reconnaissable parmi tant d’autres d’un Gérard DELAGNEAU, alors président de l’entité . , au top de sa forme et avec son humour qui ne manque pas côté parole – le directeur de la vénérable institution agricole Jean-Marc KREBS brosse comme à son habitude et avec expertise le rapport d’activité de la structure aux multiples facettes – ; un Gérard DELAGNEAU qui ne se doutait même pas en cette période dédiée à l’heure des budgets qu’un épisode sanitaire international allait éclipser tous les face-à-face à venir pendant près de trois saisons !

Trois ans se sont déjà écoulés au contraire du temps ; celui qui ne s’arrête jamais, mais fait beaucoup de changements. D’une part, les rendez-vous annuels tant attendus des professionnels du secteur qui manquaient de convivialité se déroulaient devant les écrans d’ordinateurs. Des exercices à l’oratoire beaucoup moins agréables à vivre, sans saveur et sans même dimension humaine, cela va sans dire.

En revanche, s’il possède encore ce charisme chaleureux et cette profondeur d’âme qui auront fait de lui un grand président de la structure durant toutes ces années de mandat, Gérard DELAGNEAU a cédé. L’âge obtient toujours le meilleur de nous!

Et c’est l’un de ses fidèles aficionados, Walter HURE, qui gravitait déjà dans la chambre décisionnelle dont hérite le titre et les missions royales qui vont de pair avec la fonction.

« Pénurie, rationnement, restrictions… des termes que ma génération ne connaît pas… »

Un nouveau visage présidentiel heureux de voir un nouveau sourire devant lui pour ouvrir le bal de ce qui sera le retour aux sources d’une assemblée générale coopérative digne de ce nom : un moment propice à l’écoute, aux échanges et à la discussion , sans occulter – comme dans le cas du repas servi sur place – la convivialité. Avec en plus, servi sur un plateau d’argent une conférence sur les perspectives alimentaires de la planète et la place prépondérante de Farm France dans ce contexte. Un discours bien fait offert par une très exhaustive Sylvie BRUNEL, professeur à la Sorbonne et ancienne présidente de l’association Action contre la Faim…

Un événement d’ouverture pas si simple à aborder pour le nouveau président, uniquement sur scène sur la très grande estrade propice à l’accueil. Non que l’enfant n’ait pas la fluence verbale nécessaire pour tenir une salle pleine comme un œuf en haleine – Walter HURE maîtrise parfaitement l’exercice oratoire où la lumière des projecteurs empêche l’interlocuteur de distinguer les visages du public au-dessus. le deuxième rang de spectateurs – mais parce que le contexte du moment ne se prêtait pas à l’optimisme et qu’il fallait trouver les mots justes pour ne pas sombrer dans le noir. Ou pire encore !

D’ailleurs, le jeune président de ce poids lourd de l’agriculture/viticulture qu’est 110 Bourgogne l’avouera lui-même : « aujourd’hui, les sujets qui reviennent le plus souvent à nos oreilles sont la pénurie, la restriction, le rationnement… ils ne le savaient pas jusque-là, sauf à avoir lu dans les livres d’histoire… ».

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Dès lors, il est certain que dans cette conjecture bien particulière qui est la nôtre, entre crises sanitaires sans fin, ses corollaires énergétiques qui touchent au gouffre ou à la hausse des coûts de la matière première de manière ultra-exponentielle et spéculative, il y a de quoi perdre le latin ici. .

Cependant, Walter HURE ne perdra pas pour autant son humeur : il soulignera la présence de son frère Damien, installé au fond de la salle et accompagné de sa mère. Bref, de quoi ajouter une pression supplémentaire sur des épaules pas aussi fragiles que celle de ce président qui affiche un large sourire après avoir salué son peuple !

Le primat de la « souveraineté alimentaire » : le terme est abandonné !

Conscient que le conflit en Ukraine a bouleversé les cartes de l’économie mondiale avec ses conséquences géopolitiques incertaines, Walter HURE évoquera la dépendance de la France (et de l’Europe) à l’énergie, tant au gaz qu’au pétrole.

Un regard sera porté sur les mouvements sociaux observés en France dans le domaine du transport et de la logistique, qui ont un impact direct sur certaines opérations sur le territoire.

Sans sombrer dans un pessimisme heureux, Walter HURE – bien qu’il doive pointer du doigt la limitation des approvisionnements avec une forte inflation sur certains intrants – n’en demeure pas moins confiant. « La meilleure de nos armes pour pallier tout manque potentiel reste l’anticipation des besoins… ».

Une déclaration qui lui a été attribuée et qui lui a plu, a suscité des applaudissements dans la salle d’Auxerre.

Le président néophyte tient bien son discours. Saluons au passage l’excellente position de Ferme France qui, bien qu’elle ait momentanément quitté la deuxième place du classement international – la France occupait une place privilégiée sur le podium à la fin des années 1990 – n’en reste pas moins en haut du chapeau en termes de exportations, position maintenue grâce à la commercialisation des vins et spiritueux.

« Nous n’oublions jamais que nous sommes aussi importateurs de volailles, de fruits et légumes, de viande bovine et ovine, de produits laitiers… ». Un sage rappel uniquement pour ceux qui ont perdu la mémoire !

D’un grand optimisme, Walter HURE a insisté sur la politique forte et ambitieuse qui doit animer le secteur agricole. « Nous devons améliorer et transformer notre agriculture, précisera-t-il, micro en main, pour qu’elle soit productive, compétitive, et nous permette de retrouver notre souveraineté alimentaire… ».

Le mot est sorti. « Souveraineté »! Un terme fort qui a d’ailleurs été largement expliqué par le professeur d’université qui devait succéder un peu plus tard au président de la coopérative avec de nombreux exemples et un grand nombre de chiffres. Une conversation fascinante à divers moments.

En revanche, l’enseigne du 110e Bourgogne le martèlera alors : « Il serait désastreux et irresponsable pour cette France à fort potentiel agricole de dépendre des autres nations, à l’image de ce qui se passe aujourd’hui dans le secteur de l’énergie… ».

Déchirant, vrai et efficace pour une entrée en matière sous les projecteurs, parfaitement réussie !

Il ne reste plus qu’à souhaiter au nouveau président que la récolte 2023 soit bonne et que la clémence du temps soit bénéfique aux céréales et à leur développement, que la pluie soit aussi là pour irriguer les terres et que le 110 Bourgogne poursuive son via di la prospérité économique qui est la sienne. Un désir qui n’a rien de plus…